Dommages collatéraux - Reflet d'actualité, Ps Jacques Trujillo - un regard chrétien sur l'actualité de la semaine

04 février 2022 - 1480 vues
Télécharger le podcast

Dans toute guerre, nous dit-on, il y a des dommages collatéraux. Les populations civiles, les animaux, la nature en général. L’humanité à coup sûr.

Dans la guerre contre la covid aussi.

Nous le savons ! La covid est partout.  Dans tous les pays du monde. Dans les médias et dans les conversations. Malheureusement dans nos familles aussi et parmi nos amis et connaissances. Dans nos hôpitaux évidemment. Partout ! Tellement omniprésente que certaines choses semblent disparaître de nos radars. Passent à l’arrière-plan de notre vision. Et même passent inaperçues.

C’est le cas de deux informations qui, habituellement, nous parviennent au mois de janvier. Et cette fois-ci encore. Elles sont là.

-       Le rapport d’Amnesty International sur La situation des droits humains dans le monde pour 2020-2021

  • L’Index mondial de persécution des chrétiens pour l’année 2021, publié par l’Association Portes ouvertes.

Le premier comprend 500 pages ! Le second une seule ! Mais une page A3, il est vrai.  Appuyée par les parutions mensuelles de la revue Portes ouvertes magazine.

A° Amnesty international relève les effets négatifs, dommages collatéraux, de la pandémie de covid et des mesures prises pour lutter contre elle.

Cela se traduit par l’accentuation des inégalités raciales, ethniques ou de genre puisque ces populations, déjà discriminées, ont vu leur situation fortement s’aggraver. Le rapport cite comme exemple le combat mené par les mouvements citoyens tel que Black Lives Matter.

« Dans de nombreux pays, les minorités ethniques et les populations autochtones présentaient des taux d’infection et de décès disproportionnellement élevés, en raison, entre autres, d’inégalités préexistantes et d’un manque d’accès aux soins de santé »

La pandémie a eu des effets révélateurs ou aggravant des lacunes et carences des systèmes politiques de gouvernement dans différents secteurs. Trois domaines sont particulièrement touchés :

  • « Les atteintes aux droits à la vie, à la santé et à la protection sociale ;
  • Les violences liées au genre et les menaces pesant sur les droits sexuels et reproductifs ;
  • Et la répression de la dissidence ».

 

  1. En 2020 la Covid a tué au moins 1 800 000 personnes.

La situation de nombre de travailleurs a été fortement impactée par la hausse du chômage. L’insécurité alimentaire aigüe a doublé, touchant ainsi 270 millions de personnes.

Dans certains états les personnels soignants ont été peu protégés. Les victimes dans ces professions se sont comptées par milliers.

« Les femmes travaillant dans le domaine de la santé et des soins ont été tout particulièrement affectées, dans la mesure où elles représentaient 70 % des personnes employées dans le secteur de l’action sanitaire et sociale – un secteur où les écarts de salaires selon le genre étaient par ailleurs considérables ».

A cette liste de victimes collatérales non pas directement du covid mais des mesures prises par les gouvernements pour lutter contre l’épidémie, confinement, enseignement en ligne, Amnesty rajoute les étudiants (es). Particulièrement ceux appartenant à des groupes déjà marginalisés.

La situation des migrants a été, elle aussi, impactée, situation : « déjà précaire, » pour ceux « enfermés dans des camps ou des centres de détention insalubres ou bloqués devant des frontières fermées. Des « refoulements » de réfugiés et de migrants ont été signalés dans 42 des 149 pays suivis par Amnesty International ».

Comme toujours, la recherche du bouc émissaire, coupable idéal, a été lancée. Ainsi : « Des personnalités politiques ou religieuses s’en sont prises aux groupes marginalisés, les accusant de répandre le virus. Les musulmans ont ainsi fait partie des populations prises pour cibles dans certains pays d’Asie du Sud-Est, et les personnes LGBTI dans plusieurs pays africains et européens. »

La solidarité dans la lutte internationale contre le virus, par la mise en place et la distribution de vaccins « a souffert de l’absence de la Russie et des États-Unis, ainsi que de l’accaparement des doses par les pays riches et du refus des entreprises de partager les brevets. Plus de 90 pays ont adopté des restrictions à l’exportation touchant des articles tels que des fournitures médicales, des équipements de protection individuelle et des produits pharmaceutiques ou alimentaires. ». On ne donne qu’aux riches dit-on avec beaucoup de cynisme.

La liberté elle aussi peut être placée dans la liste des dommages collatéraux. « De nombreux gouvernements ont réprimé la dissidence et, plus généralement, restreint l’espace civique. Face à des mouvements de protestation contre l’attitude de dirigeants refusant de rendre des comptes, contre l’érosion des droits sociaux et économiques et contre le racisme structurel (les manifestations de Black Lives Matter, par exemple), les forces de sécurité ont fait un usage abusif d’armes à feu et d’armes à létalité réduite, notamment de gaz lacrymogènes, tuant en toute illégalité des centaines de personnes ». Des journalistes et des défenseurs des droits humains ont été arrêtés et mis en prison.

D’autres mesures ont été prises : augmentation des systèmes de surveillance, interdictions de manifestation etc. Certains pays se sont servis de la pandémie comme prétexte pour réduire les oppositions.

La France, quant à elle est épinglée pour l’usage parfois excessif de la force publique. Le nom de Cédric Chouviat mort en janvier lors d’un contrôle routier est mentionné. Mais le rapport mentionne 15 autres cas de violences des forces de l’ordre.

La situation des migrants fortement aggravée par l’épidémie est aussi signalée. « À Paris et dans le nord de la France, les migrants et les réfugiés qui vivaient dans des campements de fortune ont cette année encore fait l’objet d’évacuations forcées récurrentes, y compris pendant le confinement, sans que ne leur soient proposés une autre solution d’hébergement ni un accès aux soins de santé. À Calais, les forces de l’ordre ont régulièrement soumis les personnes migrantes et réfugiées à des actes de harcèlement et à un usage excessif de la force. La police aux frontières a continué de refouler vers l’Italie des personnes migrantes ou demandeuses d’asile. »

En résumé, le rapport signale :

  1. Police et pandémie. Les mesures prises en Europe pour faire face à la pandémie de COVID-19 ont donné lieu à des violations des droits humains (EUR 01/2511/2020)
  2. « France. Les poursuites engagées contre les policiers qui avaient agressé un bénévole à Calais sont un signal positif contre l’impunité » (communiqué de presse, 11 juin)
  3. « France. La relaxe de l’agriculteur qui a aidé des personnes demandeuses d’asile montre que la solidarité n’est pas un délit » (nouvelle, 13 mai)
  4. France. Les mesures prises après le meurtre de Samuel Paty soulèvent des inquiétudes quant au respect des droits humains (EUR 21/3281/2020)
  5. « France. Des milliers de manifestants sanctionnés à tort en application de lois draconiennes avant et après la pandémie de COVID-19 » (nouvelle, 28 septembre)

 

B° Portes ouvertes, donne, dans l’index mondial de persécution des chrétiens, un classement des 50 pays dans lesquels la persécution contre les églises chrétiennes se manifeste. Au sommet de ce palmarès se trouvent la Corée du Nord, l’Afghanistan et la Somalie.

Lorsqu’on analyse, de plus près, cette liste, l’on remarque que les persécutions contre les chrétiens sont signalées dans des pays d’idéologie communiste (la Corée du Nord, la Chine) mais davantage dans les pays où existe une religion d’Etat, l’Islam tout particulièrement, mais aussi l’hindouisme et plus minoritairement, mais quand même, le bouddhisme et l’orthodoxie.

Est-ce que la pandémie actuelle a accentué ces persécutions ? Sans doute puisque cette période de crise, comme bien d’autres sans doute, se présente comme « un commun démultiplicateur ». Par la désorganisation, la peur qui se traduit souvent par des recherches de boucs émissaires et par les violences, par le sentiment peut-être, dans le marasme international, d’une impunité accrue.

Quoi il en soit, là aussi, combien de victimes collatérales indirectement provoquées par cette situation mondiale pourrons- nous un jour peut-être dénombrées ? Je n’en sais rien.

Mais la liberté religieuse elle aussi figure sur cette liste de victimes.

Le rapport d’Amnesty International et l’Index de l’Association Portes ouvertes sont passés en tous cas, presque, inaperçus.

Portes ouvertes accompagne l’index d’un texte biblique, celui de Paul aux Romains 12.12 : « Réjouissez-vous dans l’espérance et soyez patients dans la détresse. Persévérez dans la prière. »