
Quand le sol se dérobe sous vos pieds
Comment ne pas être abasourdi, terrifié même quand le sol se dérobe sous vos pieds. Quand il est secoué comme un prunier par un tremblement de terre ou quand sous la pression de l’eau il se dérobe en un dévastateur glissement de terrain comment il s’en est produit dans l’arrière-pays niçois pendant la tempête Alex.
« Il y a des dizaines et des dizaines de maisons qui ont disparu. Ce qu’on voit à la télévision, c’est multiplié par vingt, trente. Ce ne sont pas des plans isolés pris à la caméra pour faire du sensationnel, c’est vraiment dramatique. C’est partout », a raconté M. Ginesy, président du département des alpes maritimes.
Il raconte encore au journal le monde ce 5 octobre : les scènes de désolation qui se sont succédé alors qu’il sillonnait les vallées en hélicoptère, dimanche : un couple de Saint-Martin-Vésubie en pleurs après avoir perdu « sa maison, ses meubles, ses souvenirs, trente-huit ans de vie commune »,
38 ans de vie commune balayés en quelques secondes par une coulée de boue. Un traumatisme d’autant plus grand que nous les humains avons besoin d’avoir un lieu. Ce lieu est presquez toujours tous un endroit fixe, une maison, un immeuble, une ville, une région. Mais il peut être aussi symbolique : le centre du camp, le feu, ou la hutte communautaire des peuples nomades.
De nombreuses études ont d’ailleurs montré que les Personnes sans domicile fixe souffrent fréquemment de troubles psychiatriques liés à l’absence de lieu auquel se référer, auquel s’ancrer, auquel s’identifier.
Un lieu, c’est un peu comme le sol sous nos pieds, c’est une certitude, un substrat. Alors quand ce lieu disparait que reste-t-il ?
Voilà une question à se poser de temps à autre, je crois. Je me la suis posée quand un autre lieu symbolique a tremblé sous mes pieds : la France. En effet, quand un de mes collègues ayant contracté la COVID a failli mourir en étouffant, sa femme a contacté les services de secours qui ont simplement refusé de se déplacer, arguant à juste titre que les hôpitaux étaient en surcapacité, et incapables de recevoir du public.
La certitude que j’avais qu’en France on serait automatiquement hospitalisé en cas de coup dur en a pris un coup, ainsi que ma vision très positive et chauvine de mon pays.
Notre incapacité à produire des masques, nous rendant dépendants des produits asiatiques, notre manque de discipline amenant la deuxième vague que nous constatons, m’ont amené à repenser mon rapport à la représentation de ce lieu physique, mais aussi symbolique qu’est la France. Oh, je l’aime toujours autant, mais certainement ai-je moins de certitudes.
Et j’en arrive à ce point : si nos lieux physiques ne sont pas indestructibles, et si nos lieux symboliques peuvent aussi être altérés par les circonstances, quelles garanties pouvons-nous avoir, particulièrement dans la perspective chrétienne ?
Du point de vue physique, aucune. Jésus lui-même, le fils de Dieu n’en a pas eu. Du point de vue des lieux symboliques (patrie, famille, village, communauté) guère plus : la vie peut être tellement fragile et tout disparaitre en un clin d’oeil
Par contre la Bible nous fait l’éblouissante promesse suivante dans romains au chapitre 8 :
Car j'ai l'assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni les choses présentes ni les choses à venir, (ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur.
—> La foi dans l’amour de Dieu, avec sa fragilité, ses limites conceptuelles, et parfois le poids des traditions religieuses est encore ce qui nous permet le mieux de nous tenir moralement debout, de continuer à cultiver notre humanité.
Et ça marche ! Ça marche à une seule condition toutefois : que ce soit une foi pratique à l’image de celle de Jésus, tournée vers le prochain, et qui ne cherchant pas son intérêt propre. Elle n’a pas besoin d’être confessionnelle, ou structurée, mais elle doit venir du fond du cœur, animer tout l’être. C’est cette capacité d’empathie qui fait de nous des humains au sens noble du terme !
D’ailleurs, n’est pas bien souvent quand un cataclysme frappe que se ravivent les flammes de la solidarité et de l’amour inconditionnel ?
Notre humanité, voilà un sol qui ne se dérobera jamais sous nos pieds inspiré et nourri par l’amour de Dieu pour ses enfants.